Beaucoup ont pensé à l’écoute de ‘SABLE’, son EP paru à l’automne dernier, que Bon Iver souhaitait renouer avec la folk de ses débuts. Exit les artifices, l’auto-tune et les samples. Dans S P E Y S I D E, son premier single paru en cinq ans, Justin Vernon et sa bande revenait à l’essentiel : une voix en falsetto uniquement accompagnée d’une guitare folk et quelques arrangements de cordes évoquant l’époque du magnifique ‘For Emma, Forever Ago’.

Mais ‘SABLE’ n’était qu’un prologue, une introduction au nouveau chapitre imaginé par l’auteur de Skinny Love. Avec fABLE, cinquième album à ce jour, Bon Iver opère un virage subtil mais assumé, entre continuité sonore et renouvellement. Si l’on y retrouve les expérimentations électroniques et les arrangements fragmentés qui ont façonné ’22, A Million’ et ‘i,i’, le projet de Vernon s’aventure plus loin sur les territoires de la soul et du R&B.

L’EP, empreint de nostalgie et de mélancolie, cède ainsi la place à neuf titres davantage tournés vers la lumière. Le cinématographique Short Story ouvre l’album avec grandeur, suivi d’Everybody Is Peaceful Love, morceau qui incarne cette l’évolution personnelle et artistique de son auteur. Il y est question de paix intérieure, d’amour véritable, de maturité également. Les blessures sont toujours là, mais elles semblent désormais moins douloureuses. Comme si Vernon apprenait, peu à peu, à cohabiter avec elles.

Tourné vers l’avenir, Bon Iver adopte ce même ton lumineux et positif dans ses chansons, à l’image de Walk Home dans lequel il chante : « No, we don’t need no window curtains, And we can let the light come in. » (« Non, nous n’avons pas besoin de rideaux aux fenêtres, nous pouvons laisser rentrer la lumière« ). Une ouverture symbolique, presque manifeste. Musicalement, le groupe prolonge sa mue, intégrant des teintes gospel portées par des claviers organiques et des chœurs enveloppants sur From, Day One ou encore I’ll Be There.

L’amour, thème récurrent dans l’œuvre de Bon Iver, reste central dans ‘SABLE, fABLE’, mais il se décline ici avec davantage de recul. If Only I Could Wait, portée par le duo sensible formé avec Danielle Haim, aborde avec justesse la difficulté mais aussi la nécessité, de laisser partir l’autre quand une histoire touche à sa fin. ‘SABLE, fABLE’ s’achève en douceur avec Au Revoir, comme un point de suspension plutôt qu’un point final. Une porte entrouverte sur la suite ? Avec le temps, on a apprit que chez Justin Vernon, rien n’est jamais figé. Innovant et en perpétuelle mutation, il signe ici un album en équilibre entre l’intimité brute de ses débuts et la pop expérimentale de ses plus récentes explorations. Un album lumineux, en clair-obscur.

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